Une conférence de presse sur les sujets d’actualité tous les 14 jours, c’est la nouvelle stratégie de communication du gouvernement. Or, depuis fort longtemps, les ministres ne se sont plus rendus à l’Assemblée nationale pour apporter des réponses aux questions des députés. «Je rappelle que les représentants constitutionnels du Peuple, ce sont les députés», a précisé Moustapha Diakhaté, ancien président du groupe parlementaire Benno bokk yaakaar, mardi dans l’émission Dclique sur Tfm. L’exercice est loin de la «dictée préparée» à laquelle se soumettait le gouvernement à l’Assem­blée nationale. Lors de la 12ème Législature, les Sénégalais s’étaient presque habitués à la venue du gouvernement devant la Représentation nationale. Mais sous l’actuelle Législature, une seule séance de «questions d’actualité» a été organisée. C’était le 29 mars 2018 pour expliquer, entre autres sujets, la réforme sur le parrainage.

Decroix : «L’Assemblée nationale ne sert qu’à entériner les désiderata de l’Exécutif.»
Entre-temps, le poste de Premier ministre n’existe plus. Récemment la députée Aïda Mbodj a interpellé le gouvernement à travers une question écrite sur la gestion du Covid-19, visant notamment les ministres Abdoulaye Diouf Sarr et Mansour Faye. Elle aurait été menacée de mort. En mi-octobre, Ousmane Sonko a interpellé sur les affaires Terme Sud et une éventuelle malversation au sein de l’Administration. Sans suite. Contacté, le président du groupe Benno bokk yaakaar a juste rappelé que le gouvernement avait un mois pour répondre aux questions écrites. Cependant, Aymérou Gningue n’a pas voulu commenter la nouvelle stratégie du gouvernement.
Mamadou Diop Decroix, lui, sa question d’actualité sur l’ampleur de l’émigration clandestine n’a pas eu de réponses. Joint hier, le vice-président du groupe parlementaire Liberté et démocratie considère que le gouvernement «n’a aucun respect pour le Parlement». «Pour l’Exécutif, l’Assemblée nationale, c’est rien du tout. Ils auraient pu venir à l’Assemblée nationale mais ils n’y pensent même pas. Et personne n’est là pour le rappeler dans la majorité présidentielle. L’Assemblée nationale ne sert qu’à entériner les désiderata de l’Exécutif», déplore-t-il. Le leader de Aj/Pads précise n’avoir pas suivi le «show» du gouvernement. Pour lui, l’attitude du gouvernement vis-à-vis de l’Assemblée nationale, «n’est que l’expression de l’affaissement des institutions dans le pays».

Moustapha Guirassy : «Beaucoup de show de ce (nouveau) format»
Pour sa part, Moustapha Guirassy rappelle «l’obligation d’être républicain en respectant l’engagement pris devant le Peuple et les parlementaires qui était celui de passer périodiquement à l’Assemblée pour faire face aux députés». L’ancien ministre sous Wade concède que le gouvernement a le droit d’organiser librement sa communication. Cependant, il précise : «Dans le fond, si leur seul objectif n’était que la transparence et le partage d’informations avec les citoyens, s’inviter dans les forums publics pour débattre directement avec les jeunes et les femmes est la chose à faire. A défaut de ce débat public, le gouvernement aurait pu s’inviter au sein de l’Hémicycle en permettant cette fois-ci aux députés de l’opposition de pouvoir enfin s’exprimer librement sans contrainte aucune.» Le député de l’opposition d’ajouter : «Je crois sincèrement qu’il y a beaucoup de show de ce (nouveau) format alors que le Peuple souffre de la perte de ses enfants, qu’il est inquiet de la pénurie d’eau, qu’il se soucie de l’appauvrissement de ses eaux en ressources halieutiques, qu’il souffre du manque d’éthique dans l’espace politique. Enfin, c’est peut-être une façon toute simple de détourner le Peuple sur les effets pervers du dernier remaniement.»