Le leader de Pastef condamné à 2 ans pour corruption de la jeunesse

C’est en larmes que Adji Sarr a été conduite par les Forces de l’ordre dans une voiture. L’ex-masseuse, qui a vu le leader du parti Pastef, Ousmane Sonko, acquitté du crime de viol et de l’infraction de menace de mort, même s’il a été condamné pour corruption de la jeunesse, a tout simplement inondé le Tribunal de ses larmes. Un sentiment qu’elle ne partage pas avec son avocat, Me El Hadji Diouf, qui crie victoire parce que Ousmane Sonko a été condamné à 2 ans et devra payer à sa cliente la somme de 20 millions de francs à titre de dommages et intérêts. Une décision qui rend, du coup, inéligible le leader du parti Pastef à la Présidentielle de 2024. Du côté de la défense, c’est «une décision ridicule» qui n’honore pas la Justice sénégalaise. Car, même blanchi, Ousmane Sonko ne peut pas être candidat. Ainsi, ses avocats invitent les Sénégalais à lever le blocus instauré chez leur client à la Cité Keur Gorgui. Mais, ils n’excluent pas de déposer des plaintes contre ceux qui ont comploté contre leur client. Par Justin GOMIS –
Le leader du parti Pastef n’a pas violé Adji Sarr. Telle est la conviction du juge El Hadji Issa Ndiaye, président de la Chambre criminelle de Dakar. En rendant hier sa décision, dans l’affaire qui opposait l’ex-masseuse Adji Sarr à Ousmane Sonko, le juge Ndiaye a acquitté Ousmane Sonko du crime de viol et du délit de menaces de mort. Cependant, il l’a reconnu coupable du délit de corruption de la jeunesse, qui n’est rien d’autre qu’un délit à caractère sexuel, avant de le condamner à 2 ans de prison ferme pour ce chef.
La co-accusée de Sonko, Ndèye Khady Ndiaye, qui est logée à la même enseigne que le président du parti Pastef, a été acquittée aussi des délits de complicité de viol, de diffusions d’images contraires aux bonnes mœurs. Reconnue coupable du chef d’incitation à la débauche, elle a été aussi condamnée à 2 ans de prison ferme. En sus de cette peine, les accusés devront payer chacun une amende de 600 mille francs et solidairement la somme de 20 millions de francs à titre de dommages et intérêts à la dame Adji Sarr.
Les larmes de Adji Sarr
Une décision qui ne fait pas des heureux chez les deux parties. Car si cette peine ferme infligée à Ousmane Sonko lui fait perdre son droit d’être candidat à l’élection présidentielle de 2024, elle est loin d’être du goût de Adji Sarr, qui a fondu en larmes après le verdict. L’ex-masseuse, qui s’attendait à ce que «son bourreau» soit reconnu coupable de viol qu’elle a crié sur tous les toits de la Justice, était inconsolable dans les bras de son avocat, Me El Hadji Diouf, qui avait du mal à la calmer.
Drapée d’un ensemble taille basse de couleur bleue, Adji Sarr était «rouge» de colère et pleurait à chaudes larmes. La déception était grande et se lisait facilement sur le visage de l’ex-masseuse. Un moment choisi, par une dame du parti Pastef, pour se moquer d’elle : «C’est maintenant que tu pleures. Il fallait le faire depuis le début de cette affaire. Tu n’as pas encore pleuré. Tu meurs de honte.» Malgré ces quolibets, Adji Sarr n’avait que ses yeux pour pleurer en regardant cette dame s’attaquer à elle. Elle ne pouvait même pas répondre à cette dame, qui lui lançait des piques. Et c’est finalement l’une de ses souteneurs qui vient à sa rescousse. «Ce sont des larmes de joie. Elle pleure de joie, parce qu’on a condamné Sonko», a dit sans être convaincue cette dame qui, visiblement, avait beaucoup de peine en voyant Adji Sarr complétement abattue.
Et pour ne pas l’exposer aux flashs des photographes et aux yeux des journalistes, les éléments de la Bip, chargés d’assurer sa sécurité, sont venus l’extirper de force des mains de son avocat, Me El Hadji Diouf, qui tentait de la calmer, pour l’introduire manu militari dans une voiture 4×4 de couleur noire et la sortir vite du Tribunal.
Pour la défense du leader du parti Pastef, cette affaire n’est rien d’autre qu’un complot d’Etat pour lequel la dame Adji Sarr a été tout simplement utilisée et amenée à jouer sa partition. «Tout le monde a pu voir que la gamine Adji Sarr, qui a été utilisée, qui a été actrice et qui a joué son théâtre jusqu’au bout, a fondu en larmes, parce qu’elle s’est rendu compte, à la dernière heure, qu’elle a été utilisée et qu’il y a eu beaucoup de morts et beaucoup de mal causé au Peuple sénégalais», a dit Me Ciré Clédor Ly, un des conseils de Sonko, qui craint aussi pour sa vie. «Peut-être que si les commanditaires lui laissent la vie, elle prendra ses responsabilités pour demander pardon au Peuple sénégalais et leur expliquera ce qu’elle avait déjà commencé à faire et qui a été versé aux débats, à savoir que tout cela ne relève que d’un complot d’Etat. J’ai toujours craint pour la vie de Adji Sarr, parce que lorsque l’Etat utilise une personne dans un complot, il finit toujours par s’en débarrasser pour que dans l’histoire, ne soit pas révélée la vérité», a averti la robe noire.
Me Bamba Cissé de la défense aussi dira que «quand on parle de corruption de la jeunesse, c’est un objectif recherché par l’agent pénal». Et dans cette affaire, «si on ne parle pas de viol, on ne peut plus parler de corruption de la jeunesse», a-t-il précisé. Car, d’après lui, «s’il n’y a pas de contact sexuel, il ne peut y avoir une infraction aux mœurs parce que ces deux ne sont pas détachables. Soit il a violé, soit il est venu se faire masser. S’il n’a pas violé, on ne peut pas dire qu’il a voulu attenter à une mœurs quelconque. Il a toujours été sur le principe qu’il n’a jamais eu cette intention-là. Si on écarte le viol, toutes les infractions relatives aux mœurs doivent tomber», a indiqué Me Cissé. Estimant que c’est un procès politique, les avocats de la défense promettent de trouver une solution à cette situation qui prive leur client de la Présidentielle de 2024.
En attendant, ils comptent traduire en Justice tous les comploteurs qui ont vendu aux populations un viol inexistant. A en croire Me Bamba Cissé, Sonko a déposé plusieurs plaintes devant le juge d’instruction dans ce sens qui n’ont pas encore connu de suite. En tout cas, un des avocats de la partie civile crie victoire. «C’est une satisfaction pour les avocats de Adji Raby Sarr, mais pas une satisfaction totale. Nous aurions voulu la condamnation de Sonko, à un minimum de 10 ans ferme. Mais nous sommes obligés de nous plier à la décision souveraine des juges de la Chambre criminelle. Le viol n’a pas été retenu, mais la corruption de la jeunesse. Quand on abuse de la jeunesse d’une jeune fille pour coucher avec elle, c’est presque un viol. Si on fait étalage de sa puissance devant une jeune fille pour pouvoir accéder à ses parties intimes, c’est comme un viol. Que les autres ne crient pas victoire. La victoire, c’est qu’on n’a pas nié l’existence du contact sexuel. On n’a pas nié les dommages causés à la jeune fille. On n’a pas nié l’existence de sperme confirmée par le laboratoire de Cto. La culpabilité de Sonko a été établie et retenue par les juges de la Chambre. Nous avons une satisfaction, c’est vrai, un peu mitigée. Mais nous avons au moins une grande victoire sur une personne, qui a toujours menacé les juges, la société, l’Etat, et qui se croit au-dessus de l’Etat et des juges», s’est réjoui Me El Hadji Diouf. L’avocat reconnaît que sa cliente «aurait bien voulu la condamnation de Sonko à la peine attendue».
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