Khalifa Sall élu depuis la prison, un manque d’organisation des élections sans précédent, Wade, chef de l’opposition… les Législatives du 30 juillet étaient riches en enseignements.

Catastrophiques, nulles, mauvaises… au lendemain des élections législatives du 30 juillet, la plupart des qualificatifs sur l’organisation du scrutin penchent vers le négatif. Maître d’œuvre en tant que ministre de l’Intérieur, Abdoulaye Daouda Diallo cristallise les attaques. L’opposition monte en première ligne. D’abord, il lui a été reproché la production et la distribution des cartes d’électeur. Cette expérience à la carte biométrique Cedeao s’avère douloureuse pour beaucoup d’électeurs. A moins d’une semaine du scrutin, le ministre avoue devant la Com­mission électorale nationale autonome que 30% des électeurs ne recevront pas leur carte.
L’opposition crie au scandale car, d’après elle, ce sont ses bastions qui sont concernés par les errements du ministère de l’In­térieur. Résultats : des milliers de Sénégalais sur les 6 millions d’inscrits seront privés de vote.
Dans le chapitre des problèmes d’organisation, il faut relever que de nombreux bureaux de vote dans le pays ont tardé à ouvrir leurs portes. A Touba, fief du Pds de Me Abdoulaye Wade, 147 bureaux ont été saccagés. Sous la pression de l’opposition et de la Société civile, Abdoulaye Daouda Diallo est muté au ministère des Infrastructures à la suite du remaniement post-Législatives.
Ces Législatives ont aussi été marquées par l’investiture de Khalifa Sall comme tête de liste de Manko taxawu senegaal. Le maire de Dakar, en prison depuis le 7 mars 2017 dans le cadre de l’affaire dite de la caisse d’avance de la Ville de Dakar, ne peut cependant faire campagne. Se fondant sur le Code électoral, les avocats de l’édile socialiste qui demandaient son élargissement voient leur demande de mise en liberté provisoire rejetée par le juge d’instruction. Depuis la prison, l’édile se contente de communiqués pour convaincre les électeurs. Avec 7 députés, sa coalition vient en 3ème position derrière Benno bokk yaakaar (125) et la Coalition ga­gnante/Wattu senegaal (19). Elu député, Khalifa Sall dont l’immunité parlementaire a été levée le 25 novembre pourrait perdre cette position s’il était condamné à une peine ferme. De son procès à venir dépend d’ailleurs en grande partie son avenir politique.
Me Abdoulaye Wade fut également l’une des surprises de ces Législatives. Tête de file de la Coalition gagnante/Wattu senegaal, l’ancien président de la République aura été d’un apport considérable pour le Pds et ses alliés. Avec son charisme, il a pu enrôler Pape Diop, Mamadou Lamine Diallo, entre autres, et en faire des députés.
Finalement, le scrutin a consacré la victoire de Benno bokk yaakaar, dirigée par le Premier ministre Mahammed Boun Abdallah Dionne qui a su faire face aux attaques de l’opposition.
Le Parti de l’unité et du rassemblement du chef religieux Serigne Moustapha Sy (3 députés) a également tiré son épingle du jeu devant de grands noms de la sphère politique comme Modou Diagne Fada, Me Aïssata Tall Sall, Aïda Mbodj, Cheikh Tidiane Gadio… qui se sont contentés d’un siège chacun. Ousmane Sonko, leader de la coalition Ndawi askan wi, a marqué les entrées à l’Assemblée nationale moins d’un an après sa révocation de la Fonction publi­que.
C’est d’ailleurs la présence de ces grands noms qui a nourri l’espoir d’avoir une Assemblée nationale de rupture que la 12ème Législature avait prônée. Force est de reconnaître que devant la majorité Benno bokk yaakaar, leurs voix ne pourront peser lourd.
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