Les impacts environnementaux, sanitaires et socio-économiques de certaines mesures du plan de relance économique pour le Sénégal

Pour ramener le déficit budgétaire à 3% du Pib d’ici 2027, contre 12% en 2024, l’Etat du Sénégal, par le biais de son Premier ministre, vient de proposer un Plan de relance économique pour le Sénégal (Pres). Le Pres s’appuie sur trois piliers fondamentaux que sont la souveraineté économique, la rationalisation de la dépense publique et l’équité sociale.
Ce plan propose 37 mesures structurantes pour l’atteinte de l’objectif précité. Ces mesures étant soumises à évaluation avant une éventuelle application, il est loisible à tout Sénégalais de pouvoir y apporter sa pierre. Chacun doit pouvoir aider, dans la mesure du possible, à l’amélioration des 37 mesures.
Parmi les mesures annoncées figurent la réduction des charges et du train de vie de l’Etat, la réduction des coûts des voyages à l’étranger, la taxation de niches de financement «sous-fiscalisées» comme le numérique, le «mobile money», le foncier, les jeux de hasard et en ligne, la taxe sur le tabac ou l’importation des véhicules jusqu’à 10 ans.
L’importation des véhicules jusqu’à 10 ans sera contre-productive
Par l’augmentation de l’âge des véhicules importées, l’Etat vise à rendre les voitures plus accessibles aux ménages, stimuler le marché de l’occasion et mieux répondre aux réalités économiques. Dans ce contexte de réchauffement climatique et des accords de Paris, cette mesure va entraîner une augmentation du nombre de véhicules en circulation. Tout le monde sait que le transport est l’une des principales sources d’émission des Gaz à effet de serre (Ges) responsables du réchauffement climatique. Cette pollution de l’air ne se limitera pas aux seuls Ges, il faudra y ajouter les oxydes d’azote (NOx responsables des maladies respiratoires telles que l’asthme, les infections pulmonaires et des maladies cardiovasculaires), le dioxyde de soufre (SO2 responsable des maladies du système respiratoire, tels que la toux, l’irritation de la gorge, l’asthme, la bronchite chronique), les composés organiques volatils (Cov responsables des maux de tête, des étourdissements, des nausées, de la fatigue, de l’irritation des yeux, du nez et de la gorge, ainsi que des difficultés respiratoires), les particules en suspension (PM10 et PM2,5) et enfin les microplastiques qui se retrouvent dans nos assiettes et nos eaux de boisson.
De surcroît, une augmentation du parc automobile va entraîner une augmentation des embouteillages dont le coût sur notre économie se chiffre à 235 milliards (source Réussir Business).
Une évaluation montrera très facilement que le coût négatif de cette mesure (réchauffement climatique, coût de santé des populations pouvant aller jusqu’à la mort, pertes économiques du fait des embouteillages) sera de loin supérieur à sa rentabilité financière. De surcroît, en favorisant les importations, l’Etat du Sénégal plombe les potentiels investisseurs qui souhaiteraient fabriquer, monter et/ou produire des véhicules sur place.
Augmentation de la taxation des «armes de distraction massive»
La mesure d’augmentation de la taxation du tabac à hauteur de 100% est une mesure forte à féliciter. Au-delà des revenus générés, cela permettra de réduire le tabagisme dans notre pays. En effet, d’après l’Organisation mondiale de la santé (Oms), l’augmentation des taxes sur le tabac est la solution la plus efficace et la plus rentable pour réduire le tabagisme, quel que soit le contexte. L’expérience de plusieurs pays a montré que cette augmentation s’accompagne d’une réduction du nombre de morts à cause du tabac. L’Oms estime qu’une hausse de taxes sur le tabac permettant d’en augmenter le prix de 10% réduit le tabagisme d’environ 5% dans les pays à revenu faible ou intermédiaire.
Quant à la mesure d’augmenter la fiscalité sur les jeux de hasard, il faut la saluer.
A défaut d’interdire cette «arme de distraction massive» que sont les jeux de hasard, cette mesure peut freiner l’expansion de ce fléau qui est en train de détruire notre société. D’après plusieurs études, les jeux de hasard peuvent entraîner de graves problèmes de santé liés à des difficultés financières, à des ruptures, à la violence familiale, à une maladie mentale ou au suicide. En d’autres termes, les jeux de hasard sont devenus un problème de santé publique. Cependant, une cellule d’accompagnement psychologique et sociale doit être mise en place pour accompagner cette mesure car plusieurs jeunes, accros de ces jeux, trouveront difficilement les moyens pour s’y adonner, ce qui peut mener à l’insécurité.
Pr Adams TIDJANI
Imem/Alpe