La lutte contre le Covid-19 continue de plus belle dans la zone Nord. Dans cette lutte sans merci, la frontière entre le Sénégal et la Mauritanie constitue un enjeu de taille pour les autorités administratives et sanitaires. Ces dernières, à travers le Comité régional de lutte contre la pandémie, ont réussi à verrouiller la quasi-totalité des points de passage.

C’était un enjeu de taille, car il a toujours été difficile pour les autorités administratives de surveiller la frontière dans la zone Nord du pays, compte tenu de plusieurs paramètres. En effet, la longueur de la ligne de démarcation entre ces deux pays, séparés sur une grande distance par le fleuve Sénégal, serait estimée à plus de 667 kilomètres. Une distance pas facile du tout à surveiller à cause des nombreux mouvements qui s’y opèrent quotidiennement. Il s’y ajoute que beaucoup de points de passage sur le long du fleuve sont situés à hauteur de villages logés de part et d’autre de la frontière et sont utilisés tous les jours par les populations. C’est le cas par exemple des villages de l’Ile-à-Morphil où certaines populations de la commune de Démette et environs font le marché en terre mauritanienne et entretiennent d’ailleurs avec les Mauritaniens des relations à la limite familiales. Malgré tout, les autorités administratives ont réussi jusque-là à mettre en place un dispositif de surveillance assez correct, permettant de sécuriser les villes et villages nichés dans la zone frontalière avec l’implantation d’une Police des frontières à Rosso Sénégal, principal poste frontalier, objet d’un trafic très intense. Des efforts conséquents avaient aussi été faits pour surveiller la plupart des points de passage officiels estimés à une dizaine.
Avec l’apparition du coronavirus, le Comité régional de lutte contre cette pandémie a pris un certain nombre de mesures pour sécuriser davantage la frontière. A cet effet, la Police des frontières a été renforcée en hommes et en matériels pour non seulement remplir sa mission originelle, mais aussi s’assurer que tous ceux qui traversent ne présentent aucun symptôme du Covid-19. Ce dispositif a d’ailleurs évolué dans la mesure où les autorités administratives et particulièrement le Comité régional de lutte ont durci les mesures de surveillance devenues plus strictes. Elles ont été apparemment très efficaces et leur impact plus visible après la décision des autorités mauritaniennes de fermer d’abord partiellement, puis complètement ses frontières avec le Sénégal. Toutes ces dispositions ont permis aux deux pays de lutter efficacement contre la propagation du coronavirus. Côté sénégalais, cela s’est traduit par une bonne gestion de la situation sanitaire avec un seul cas communautaire qui aurait transité par la frontière.
Dans les autres zones où il existe des points de passage non officiels, la situation semble aussi avoir été bien maîtrisée. C‘est principalement le cas de la commune de Ronkh où la sécurisation de la frontière a également posé problème à un certain moment, mais a fini quand même par être maîtrisée. En effet, il y a quelques semaines, le maire de cette commune qui polarise une frontière de quarante kilomètres au moins avec la Mauritanie avait alerté les autorités après avoir constaté plusieurs mouvements au niveau de cette zone du fait de piroguiers qui transportaient clandestinement des passagers venant de l’autre côté de la rive. Amadou Tidiane Ndiaye avait dit à l’époque ses craintes de voir ces personnes propager le virus dans la commune de Ronkh et le reste du pays, et avait ainsi invité les autorités administratives à sécuriser la frontière. Selon le premier magistrat de cette commune du Walo, son appel n’est pas tombé dans l’oreille de sourds. Joint par téléphone, il a fait savoir que dès le lendemain de sa sortie dans les médias, un détachement de l’Armée y a été envoyé et a pris position à divers endroits pour surveiller les mouvements des populations. Cette présence est dissuasive, selon Amadou Tidiane Ndiaye, dans la mesure où aucune traversée clandestine n’a été constatée ces derniers jours. Cela, explique-t-il, est dû surtout au fait que ce sont en général les fraudeurs qui font traverser les passagers clandestins. Et puisqu’ils ont des informateurs dans plusieurs villages, «ils ont été donc informés de la présence des Forces de l’ordre et ont cessé toute activité», dit-il.
Globalement, les frontières du Nord, qui nourrissaient jusque-là de nombreuses craintes de la part des populations, n’ont pas posé problème aux autorités administratives et sanitaires qui, par le biais du Comité régional de lutte dirigé par le gouverneur de la région Alioune Aïdara Niang, continuent de veiller régulièrement sur les mouvements des populations, même s’il faut reconnaître qu’il sera très difficile de surveiller les multiples points de passage clandestin disséminés tout le long du fleuve.