Les étudiants de l’université Cheikh Anta Diop réclament que les enseignements et productions littéraires de leur parrain, servent à l‘actuelle génération. Selon le Mouvement Carbone 14 et Campus 2 H,  Cheikh Anta Diop a restauré la dignité de l’homme noir, mais est encore peint sous des traits pas du tout reluisants, par certains penseurs. La  2ème édition de la Marche «5000 jeunes pour apaiser les espaces universitaires», organisée à l’Ucad, a été l’occasion de réclamer la réhabilitation de sa pensée.Par Amadou MBODJI

– Les étudiants de l’Université de Dakar veulent que la pensée de Cheikh Anta Diop, le parrain de leur université, soit restaurée. Ils l’ont fait savoir ce mardi, au cours d’une marche initiée dans l’espace universitaire par le Mouvement Carbone 14 et Campus 2 H, pour apaiser les espaces universitaires.  «La marche, on l’a ficelée sur le thème : «L‘université parle au Peuple pour la réhabilitation de la pensée de Cheikh Anta Diop». Hors du cadre institutionnel, Cheikh Anta est connu et on a eu à faire le tour du pays avec des conférences. Les gens connaissent le nom mais maintenant, le nom c’est une chose. La production intellectuelle de Cheikh Anta Diop, c’est carrément autre chose», a fait savoir Saliou Papa Diop, chercheur, chargé de communication du Mouvement Carbone 14, qui renvoie au laboratoire Carbone 14 créé par Cheikh Anta Diop. Au-delà de l’instauration de la paix que vise cette marche, dans les espaces universitaires en proie à des «violences», avec la récurrence des affrontements entre étudiants et Forces de l’ordre. Le dernier en date, s’étant produit à l’Université de Bambey, suite au décès d’un étudiant. Les organisateurs assurent que le but de cette marche est de célébrer ce grand penseur qu’est Cheikh Anta Diop, «en poussant les gens à s’approprier son œuvre». «Pour nous, c’est l’élément le plus essentiel, l’œuvre. On peut même ne pas connaître l’homme, mais l’œuvre est titanesque», argumente le chargé de communication de Carbone 14.  Nation négre et culture et Civilisation et barbarie sont parmi les œuvres les plus populaires de Cheikh Anta Diop. «Mais, les étudiants disent être dans l’incapacité de mettre la main sur les productions du grand penseur. Nous souhaitons que ces articles scientifiques soient mis à leur disposition. Les articles scientifiques de Cheikh Anta, j’en possède une collection. Et ils ne sont disponibles que dans deux bibliothèques, mais personne n’est scandalisé. C‘est comme si c’était normal», dénonce Saliou Papa Diop, qui ré­clame l’introduction dans les curricula,  des enseignements de Cheikh Anta Diop dans le domaine des sciences humaines  sociales et sciences exactes. «Il faut dire qu’il y a une partie coloniale de nos curricula. Le slogan de l’université Cheikh Anta Diop, c’est la lumière est ma loi. Quelle lumière ? A partir de 1950, ils ont fusionné les quatre facultés et c’est cette lumière là qu’ils ont reconduite. Alors que nous avions nos lumières endogènes ici», fait remarquer M. Diop.

Galien ou Cheikh Anta ?
Cheikh Anta Diop a rehaussé la race noire, en disant qu’elle a une culture, une histoire et une religion.  Le chargé de communication de Carbone 14 trouve paradoxal que Galien soit célébré dans l’espace universitaire, en étant considéré comme le patron des pharmaciens, alors que «Cheikh Anta Diop ne dispose pas de ce privilège».  «Galien est considéré comme le patron des pharmaciens, je n’ai rien contre ça. Ce que Galien a dit à l’homme noir, c’était une insulte, mais n’empêche, on est en train de le célébrer. On ne devrait même pas associer le nom de Galien à l’Afrique, c’est une insulte. On a d’autres modèles à célébrer, comme Cheikh Anta et d’autres», soutient M. Diop, qui souhaite aussi l’introduction des langues nationales dans les programmes scolaires. Repré­sentant le directeur de l’Institut fondamental d’Afrique noire (Ifan), Dr Cheikh Abdoulaye Niang, chercheur à l’Ifan, de saluer l’initiative de cette marche, en «disant qu’il n’y a pas plus citoyen que de participer à cette initiative». C‘est d’ailleurs à l’Ifan que s’est révélé Cheikh Anta Diop, qui est un scientifique de formation doublé d’un historien et d’un an­thro­pologue, entre autres.
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