Son premier roman, «Un lion en cage» est paru en juin 2016, aux éditions L’Harmattan Sénégal et a reçu le grand prix de la Première dame pour la promotion de la littérature féminine. Son jeune âge en a étonné plus d’un. Comment à 21 ans, peut-on écrire un roman aussi abouti ? Avant celui-ci, Ndèye Marie Aïda Ndiéguène, confie qu’elle a eu, comme beaucoup de jeunes filles, à passer par l’étape du journal intime. Elle raconte comment l’envie d’écrire la tenaillait alors qu’elle n’était encore qu’en classe de Cm2.

Vous avez tenu un journal intime ?
Oui j’en ai tenu un, où je racontais à chaque soir, ce que je vivais au jour le jour. J’écrivais à l’intérieur aussi des poèmes, des nouvelles que je ne montrais à personne.  C’était une écriture personnelle. Je tenais toujours un journal, j’écrivais.

Quand avez-vous commencé à tenir ce journal ?
J’ai commencé en classe de Cm2. J’écrivais pour exprimer mon ressenti par rapport à l’école, par rapport à la vie de tous les jours, ça m’a permis d’extérioriser mon ressenti. J’écrivais surtout des poèmes, ensuite ça a évolué vers l’écriture de petits récits, de nouvelles. Mais lorsque j’étais en classe de seconde, j’ai participé à un concours d’écriture à l’école. J’ai été encadrée par l’écrivaine canadienne Laura Attala. C’était un moyen pour moi, de découvrir d’autres as­pects de l’écriture, une écriture plus imagée. J’ai changé de style, je me suis orientée vers une écriture beaucoup plus engagée, moins féerique, moins imaginaire.

Ça a duré combien de temps ce journal intime ?
C’était surtout au collège jusqu’à la classe de 3ème jusqu’à la classe de seconde. Après je n’avais plus le temps.

Qu’est-ce qui vous a poussé à tenir ce journal intime ?
C’était la vie de tous les jours, les événements que je vivais, la complexité de l’être humain en quelque sorte. Tout ce que je voyais autour de moi, surtout à  l’école. J’étais dans une classe scientifique. Pourtant, j’avais une grande aptitude dans les matières littéraires, dans ce journal, je m’interrogeais. Je me parlais à moi-même, me disant est-ce que je dois choisir un métier plus lié aux lettres et à la littérature plutôt qu’un métier scientifique. J’ai toujours aimé me questionner.

On dit souvent que ceux qui tiennent des journaux intimes sont des personnes asociales, renfermées sur elles-mêmes. Est-ce le cas pour vous ?
J’étais quelqu’un de très solitaire, très dans son monde, très dans son univers. J’avais un univers, très particulier et c’était difficile parfois de me faire comprendre par mes camarades ou de comprendre eux-mêmes certains de leurs comportements et attitudes. C’était peut être dû à ma façon de penser qui était trop étrange pour mon âge. J’ai toujours eu ce petit décalage avec le monde extérieur, et l’écriture, c’était un moyen pour moi de m’évader, d’extérioriser ce que j’étais au fond de moi et que je ne montrais pas forcément à tout le monde.

Quel était le contenu de votre journal intime ?
Mes expériences négatives que je racontais, c’était toujours en rapport avec l’école. J’étais une élève, chevronnée et quand j’avais une mauvaise note, ou un petit accrochage avec un professeur, j’allais l’écrire. C’était un moyen surtout pour moi, de passer à autre chose. De panser mes blessures, de me soulager. Le lendemain quand j’allais  à l’école j’oubliais et je passais à autre chose, parce que je l’avais écrit.

Qu’est ce qui explique le besoin de se confier à un cahier plutôt que de le faire avec une personne en chair et en os ?
On a des amis mais le journal intime est au delà de l’ami. Le journal intime quand tu lui confies quelque chose, il ne te répond pas, il ne te donne pas son avis. L’ami par contre, éprouve toujours le besoin de te dire, ah ce n’était pas bien, oui c’était bien. Alors que dans un journal intime lorsqu’on couche sa pensé ou son ressenti, il reste muet. On s’interroge nous-mêmes et on n’a pas besoin de cet avis extérieur, c’est ce qui est intéressant.

Aujourd’hui vous êtes devenue une écrivaine en quoi le fait d’avoir tenu un journal intime vous a été utile ?
Les journaux intimes, c’est quelque chose de très intéressant. Quand on se relit ça nous rappelle  l’époque où on vivait ça et parfois il y a même des poèmes que  je revois et qui m’inspirent beaucoup dans mon écriture actuelle. Mon écriture reste toujours un journal intime.

Dites-nous comment ?
C’est tellement personnel que j’ai l’impression que ce que j’écris c’est toujours à moi. C’est une partie de moi que je confie. Ecrire un livre, c’est se confier à des personnes étrangères. A partir du  moment où vous écrivez et que vous le publiez, n’importe qui peut déceler une partie de votre personnalité, c’est ce qui me faisait peur au début. Quand je soumettais mon manuscrit j’avais peur qu’à partir de mon manuscrit, on puisse déceler des parties de moi.