En publiant son rapport annuel sur la liberté d’expression dans le monde, l’Ong Article 19 se dit préoccupée par la situation du Sénégal en cette veille de Présidentielle. Selon elle, il y a une baisse de liberté dans l’espace civique liée aux répressions de marches et de manifestations. Article 19 tire ainsi la sonnette d’alarme.
L’Ong Article 19 a publié hier son rapport annuel sur la liberté d’expression à travers le monde. Ce travail basé sur cinq domaines, à savoir la liberté des médias, l’espace civique, la liberté numérique, la protection et la transparence, montre une baisse de la liberté d’expression au cours des trois dernières années et une baisse continue depuis 10 ans. Selon le document partagé hier, «78 journalistes et 312 défenseurs des droits de l’Homme ont été tués. 226 journalistes ont été emprisonnés dont 194 d’entre eux pour complot contre l’Etat. 97% de journalistes incarcérés sont des reporters locaux. En moyenne, 90% des crimes physiques commis contre les journalistes restent impunis». Ainsi, il ressort du rapport que 48 pays ont enregistré une baisse générale de la liberté d’expression entre 2014 et 2017. Une baisse relative, selon Fatou Jagne Senghor, qui présentait le rapport, à «l’effondrement de la liberté des médias à travers le monde et à une augmentation de l’intimidation des journalistes, y compris des attaques verbales et physiques». Au niveau africain, le pays où la liberté d’expression est plus menacée est le Burundi avec un indice de baisse estimé à 54%. Une situation qui s’explique, d’après la directrice régionale de Article 19, par la situation politique que traverse ce pays. Mais le Sénégal n’est pas exempt de tout reproche. Selon le rapport, la liberté d’expression a beaucoup chuté au niveau de l’espace civique du fait des répressions de marches et de manifestations d’étudiants. Le Sénégal a aussi régressé à cause du Code de la presse voté ces temps-ci. Selon Mme Senghor, ce Code est un fourre-tout et constitue un danger. «Alors, pourquoi le pays devrait garder cette loi si le Président rassure qu’il n’emprisonnera pas de journalistes durant son magistère», se demande-t-elle. Pour Fatou Jagne Senghor, même si on ne met pas des journalistes en prison, on peut s’en servir un jour. Ce qui l’amène ainsi à dire que ce Code ne doit pas être promulgué, en ce sens qu’il constitue une intimidation pour les journalistes. «Cette loi est contraire aux lois internationales, dit-elle. Il y a des délits de presse qui ne sont plus en phase avec les normes internationales telles que la diffamation», remarque la directrice régionale qui estime que «les peines civiles suffisent comme sanctions».
Par ailleurs, les membres de l’Ong Article 19 se disent préoccupés par la sécurité sociale en cette approche de l’élection présidentielle. Selon Fatou Jagne Senghor, «il y a une rupture de dialogue qui inquiète». «L’Etat nous inquiète et le service public ne joue pas son rôle», précisent-elle avant d’ajouter qu’«il y a un risque de tensions». En Gambie, le rapport indique en revanche une très grande avancée de la liberté d’expression depuis 2017, coïncidant avec l’avènement de Adama Barro. Presqu’une évidence si on sait que ce pays sortait d’une dictature sanglante d’une vingtaine d’années. «Sous le règne de son ancien Président, Yahya Jammeh, la couverture des sujets sensibles entraînent des arrestations arbitraires ou des enlèvements. Plusieurs journalistes se sont exilés. Mais les médias précédemment fermés ont ouvert leurs portes, y compris The Daily News qui avait fermé depuis 2012», a souligné le rapport.
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