Les bouquinistes parisiens, plus grande librairie du monde à ciel ouvert, présents depuis 450 ans sur les quais de Seine, refusent d’être déplacés par les autorités pour assurer la sécurité de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques. Une tribune de soutien a été publiée dans le quotidien Le Monde et une pétition est en ligne.

Dans le journal Le Monde, plus de quarante personnalités du monde de la culture dont Edgar Morin, Mona Ozouf ou encore Michelle Perrot, signent une tribune voulant alerter les autorités. «Comment comprendre cette funeste décision […] selon laquelle les célèbres et anciens […] bouquinistes des quais de Sei­ne devraient être délogés et leurs fragiles boîtes démantelées […], pour des raisons de sécurité ?», se demandent les intellectuels dans le quotidien du soir. «Ce plaidoyer en faveur des bouquinistes de Paris est aussi, plus généralement, en défense de la culture en ce qu’elle a de plus noble sur le plan éducatif, de plus élevé sur le plan moral et de plus précieux sur le plan historique», ajoutent-ils. Dans un courrier adressé aux bouquinistes le 25 juillet, la Préfecture de police de Paris estime «indis­pensable»  pour sécuriser la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de 2024, que les boîtes, dans lesquelles ils commercialisent des livres d’occasion et qui sont situées dans le périmètre de la cérémonie, soient «enlevées». La Préfecture s’appuie notamment sur un article du Code de la sécurité intérieure qui prévoit un périmètre où «l’accès et la circulation des personnes sont réglementés» afin d’assurer la sécurité d’un «lieu ou d’un événement exposé à un risque d’actes de terrorisme».
En effet, pour la première fois de l’histoire olympique, la cérémonie d’ouverture des Jo se déroulera à l’extérieur d’un stade, sur la Seine, au cœur de la capitale, le 26 juillet 2024. Ce spectacle fluvial s’étendra sur six kilomètres, du pont d’Aus­terlitz au pont d’Iéna, et la flamme olympique trônera Place Trocadéro. Suite à cette annonce, les bouquinistes et de nombreux soutiens de ces derniers se font entendre. «On est un symbole majeur de Paris, ça fait 450 ans qu’on est là. Vouloir nous gommer du paysage alors que la célébration de ces jeux doit être la célébration de Paris, ça paraît un peu fou», fustige Jérôme Callais de l’Association culturelle des bouquinistes de Paris.

Tribune de soutien dans Le Monde
«Les bouquinistes des quais de Seine figurent au Pa­trimoine mondial de l’humanité. Il est difficile d’imaginer les quais de Seine sans bouquinistes, ça revient à détruire l’âme de Paris. Mobilisez-vous pour la sauvegarde des bouquinistes, signez cette pétition», est écrit sur la page de la péti­tion pour la «sauvegarde des bouquinistes des quais de Seine» sur Change.org. Lancée le 26 juillet 2023, cette dernière a reçu plus de 66 000 signatures, le 9 août à 18h. Pour sa part, la mairie de Paris, dans un communiqué du 27 juillet, reconnaît que leur activité «fait partie de l’identité des quais de Seine». Elle estime à 570 le nombre de boîtes concernées par un éventuel enlèvement, soit 59% du total. Sans revenir toutefois sur l’injonction de la Préfecture, la ville propose de prendre en charge l’enlèvement et la repose des boîtes, ainsi que la rénovation «à ses frais» de celles qui auront été abîmées dans l’opération. «Cette rénovation constituera un élément d’héritage supplémentaire des jeux et contribuera à appuyer la candidature des bouquinistes des quais de Seine au Patrimoine culturel immatériel de l’Unesco», ajoute-t-elle. La ville invite également les bouquinistes à participer à un «village des Bouquinistes» dans un quartier littéraire «proche de la Seine».
Jérôme Callais estime, lui, que certaines boîtes sont «trop fragiles» pour être transportées et évalue à 1, 5 million d’euros le chantier de rénovation de toutes les boîtes.
Rfi