Propos recueillis par Amadou MBODJI – ARRESTATION DE BACHIR FOFANA

«L’arrestation du journaliste Bachir Fofana, pour avoir exprimé une opinion dans ce qui est censé être une démocratie, doit nous alerter tous», martèle Moussa Niang. Selon lui, la promesse présidentielle de protéger les lanceurs d’alerte n’a pas été tenue : «Aujourd’hui, on utilise les mêmes lois liberticides héritées du passé pour faire taire les voix discordantes.»
Il cite également le cas de Abdou Nguer, qu’il qualifie de «pathétique pour la magistrature», révélateur d’une Justice instrumentalisée.

LIBERTES INDIVIDUELLES ET REDDITION DES COMPTES
Pour Moussa Niang, «la reddition des comptes doit être un principe sacro-saint, permanent et appliqué à tous». Mais il met en garde : «Elle ne doit pas devenir un prétexte pour des règlements de comptes politiques.»
Il plaide pour une réforme pénale axée sur le respect des droits humains et pour une Justice indépendante. «Au­jourd’­hui, au Sénégal, la Justice sert d’épée de damoclès au pouvoir pour éliminer des adversaires politiques», déplore-t-il.

UNE EXECUTION BUDGETAIRE SOUS SILENCE
Le coordonnateur des cadres de Gueum sa bopp ne décolère pas contre l’absence de transparence budgétaire. «Ce silence n’est pas une simple négligence administrative, c’est une insulte à l’intelligence citoyenne», dit-il à propos du retard dans la publication des rapports budgétaires du T1 2025 et du T4 2024.
Il accuse : «Cette dette contractée n’a servi ni à bâtir des écoles ni à équiper des hôpitaux. Elle a surtout entretenu des luxes indécents.» A ses yeux, le déséquilibre budgétaire est criant : «Quand 2, 5 milliards sont consacrés à l’investissement national, contre 9, 5 milliards pour le fonctionnement des institutions, les priorités sont inversées.»

SITUATION POLITIQUE
Pour le responsable politique, le pays est au bord du gouffre. «Le Sénégal s’effondre dans les méandres du hasard, l’Etat mène un combat de survie politique en mettant à mort notre démocratie», affirme-t-il. Il dénonce une liberté d’expression «garantie sur le papier, mais hypothétique après l’expression».

ESPOIRS OU DESILLUSIONS
«A vrai dire, ce pays a déjà touché le fond», lâche-t-il, amer. Pour lui, il faut un réajustement, non un plan d’austérité. Il recommande un train de vie de l’Etat revu à la baisse, une rationalisation des agences publiques et un appui fort au secteur privé. «Le pouvoir d’achat des ménages doit redevenir une priorité», insiste-t-il.

DETTE CACHEE ET GOUVERNANCE
Moussa Niang évoque la polémique autour d’une supposée dette dissimulée. Il interpelle : «Comment est-ce possible de tromper une institution aussi rigoureuse que le Fmi ?» Il accuse le régime de manipulation et appelle à un retour à la vérité. «Le Fmi n’a reçu aucun rapport crédible ; l’eurobond sénégalais est en chute libre.»

SORTIE DE L’IMPASSE
Pour lui, «il faut rétablir la confiance avec les institutions internationales, mécaniser l’agriculture, éradiquer la pauvreté, redynamiser l’économie, soutenir les jeunes et renforcer le système sanitaire». Et de prévenir : «Si on ne fait rien, le moindre choc exogène peut entraîner des conséquences majeures.»

CANDIDATURE DE MACKY A L’ONU
Interpellé sur une possible candidature de l’ex-Président Macky Sall, Moussa Niang appelle à la retenue : «L’attitude la plus intelligente, c’est d’attendre l’officialisation.» Mais il nuance : «Si Macky Sall est candidat, l’intelligence d’Etat est de soutenir un fils du pays, au nom de la stabilité nationale. Le Sénégal ne doit pas être la risée du monde.»
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