C’est ce jeudi qu’est attendu le verdict du Tribunal de grande instance de Thiès dans le cadre de l’affaire opposant l’usine Touba protéine marine (ex-Barna Sénégal) au Collectif «Taxawu Cayar», selon lequel «l’industrie en question a enfreint, à plusieurs reprises, le Code de l’environnement du Sénégal et l’étude d’impact environnemental, réalisée avant son ouverture, était truffée d’inexactitudes».

Par Cheikh CAMARA – Après l’organisation d’une série de manifestations sous l’égide du Collectif «Taxawu Cayar» contre l’usine de farine de poisson Touba Protéine Marine (ex-Barna Sénégal), affirmant que «celle-ci pollue notre terre, notre air et notre eau, et détruit nos moyens de subsistance», une assignation a été déposée au Tribunal de grande instance de Thiès pour demander une injonction qui fermera temporairement cette entreprise. Selon les protestataires, «le Tribunal de grande instance de Thiès a reçu des preuves accablantes de la présence de métaux toxiques dans l’eau potable, ainsi que des documents vidéo montrant un camion de l’usine déversant illégalement ses déchets dans le lac Mbawane de Cayar qui est relié à la nappe phréatique». Le collectif, selon qui «l’usine avait violé le droit de la communauté à un environnement sain en polluant l’air de la ville et sa source d’eau potable», fait état d’une «analyse indépendante effectuée par le Laboratoire d’hydrologie et de toxicologie de la Faculté de médecine de l’université de Dakar, qui révèle des niveaux de chrome et de sélénium dépassant les limites légales dans l’eau du robinet de Cayar, et la présence de ces mêmes métaux toxiques en quantité élevée dans le lac Mbawane, qui est relié à la nappe phréatique». Les protestataires, qui remarquent que «les propriétaires espagnols de l’usine ont vendu leurs parts» et s’engagent à «faire fermer l’usine quels que soient les nouveaux propriétaires», se veulent catégoriques : «Il n’est pas question de croiser les bras devant la menace qui pèse sur la vie de nos concitoyens de Cayar à cause de cette usine qui est en train de détruire le cadre de vie et le cadre touristique de la ville, mais aussi l’environnement et la santé des populations.» L’adjoint au maire de Cayar, Mamadou Ba, lui, de souligner : «La lutte ne faiblira pas, tant que les populations n’auront pas satisfaction. La question est simple, les cheminées dégagent une odeur nauséabonde qui met en péril la vie des populations et l’usine doit chercher à régler définitivement cette question, sinon la lutte va se poursuivre jusqu’au bout.»

L’avocat du Collectif «Taxawu Cayar», Me Demba Ciré Bathily, déclare que «l’usine a enfreint la loi environnementale de notre pays à plusieurs reprises». Et de poursuivre : «Nous ne pouvons que conclure que l’usine n’a pas dit la vérité au Tribunal, aux médias et, plus choquant encore, aux habitants de Cayar et du Sénégal.» Les analyses du laboratoire indépendant, qui ont suivi l’échantillonnage de l’eau vérifiée par un huissier, ont révélé «des niveaux élevés de métaux toxiques dans l’eau du robinet dont plus de trente fois le niveau de sélénium et quatre fois le niveau légal de chrome, selon le Code juridique sénégalais NS-05-033, qui s’applique à l’eau potable». Selon lui, il a été relevé «des niveaux élevés de métaux toxiques dans l’eau du lac dont près de quatre fois le niveau légal de sélénium et près de trois fois le niveau légal de chrome, selon le Code juridique sénégalais NS-05-061, qui s’applique aux masses d’eau telles que les lacs», «de faibles niveaux d’oxygène dans l’eau du lac». «Taxawu Cayar» de renchérir : «Les résultats suggèrent que le lac Mbawane est pollué par des matières organiques biodégradables et que, par conséquent, le lac est mal oxygéné, empêchant ainsi toute forme de vie aquatique.»

Touba Protéine Marine rejette les accusations de «Taxawu Cayar»
A travers de fortes mobilisations de soutien à l’initiative d’une bonne partie de la population de Cayar, d’honnêtes citoyens du village traditionnel des pêcheurs ont jugé nécessaire de dénoncer «le mauvais procès fait à l’unité de production de farine et d’huile de poisson, Touba Protéine Marine (Tpm), qui a toujours respecté les normes environnementales». Ces populations des localités impactées positivement par cette usine sont plusieurs fois sorties massivement pour soutenir les promoteurs de l’usine et magnifier «les opportunités qu’ils ont offertes aux riverains». Des notables, pêcheurs, mareyeurs, femmes transformatrices de poisson, employés de l’usine, qui encouragent le Directeur général de Tpm, Babacar Diallo, à «mener ses activités commencées en 2018 et à continuer de poser des actes concrets de développement local et de créer des richesses». Selon ces derniers, «c’est grâce à Tpm que les déchets, qu’on laissait pourrir ou qu’on enfouissait sur la plage, sont valorisés. Ces avaries, qui sont une matière première pour l’usine, font aujourd’hui gagner de l’argent à des acteurs de la pêche». Aussi, le Directeur général, Babacar Diallo, de souligner «la contribution de Tpm dans la sauvegarde de l’environnement du littoral», remarquant qu’«au-delà des opportunités économiques en termes de fiscalité pour la commune de Cayar et d’emplois pour les jeunes, l’usine augmente les revenus des acteurs de la pêche car ils y vendent des déchets de poisson» transformés en farine et huile pour les minoteries (aliments de volaille et de bétail) et les industries de cosmétiques. Selon lui, «Tpm, qui sert les intérêts de 300 mareyeurs et femmes transformatrices, dispose de machines spécialisées de dernière génération dans le traitement des odeurs et des eaux usées».
Devant ses avocats, Mes Boubacar Cissé et Barma Faye, il rappelle que «la construction de l’usine a nécessité sept milliards F Cfa». Que «Tpm, qui a effectué toutes les démarches pour son implantation et respecté les normes environnementales, a créé 57 emplois directs et 300 indirects, construit cinq (5) cabines au niveau du Poste de santé de Cayar, une mosquée à la gare routière, équipé la morgue de Mbawane et ouvert une ligne de crédit de 100 millions F Cfa pour accompagner 500 femmes dans leurs activités économiques».
Correspondant