Un roman posthume de Gabriel Garcia Marquez a été publié le mercredi 6 mars en espagnol, une œuvre qui était devenue «indéchiffrable» pour le lauréat colombien du Prix Nobel rongé par les pertes de mémoire à la fin de sa vie, selon ses fils Rodrigo et Gonzalo, qui ont dû faire un «travail d’archéologue» pour en rassembler les fragments.

Ce court roman inédit, Nous nous verrons en août, est publié à l’approche du dixième anniversaire de la mort, le 17 avril 2014, de l’auteur de Cent ans de solitude, de L’amour au temps du choléra ou de son roman Chronique d’une mort annoncée, couronné du Prix Nobel de littérature en 1982. Une quinzaine d’années avant sa disparition, «Gabo» a commencé à écrire ce livre qui raconte l’histoire de Ana Magdalena Bach, une femme se rendant chaque année en août sur la tombe de sa mère, sur une île des Caraïbes. La protagoniste profite de ses voyages pour laisser de côté sa vie de chasteté et multiplier les rendez-vous érotiques avec des inconnus. En 1999, Garcia Marquez a lu publiquement le premier chapitre, mais s’est abstenu de publier le reste de l’œuvre, qui ne le satisfaisait pas, et s’est contenté de donner des versions du manuscrit à ses proches. Considérant cet ouvrage comme un non-sens et un «gâchis», il en a finalement abandonné l’écriture, ont expliqué Rodrigo et Gonzalo Garcia Barcha, lors d’une conférence de presse virtuelle organisée ce mardi depuis l’Espagne.
Le «livre est devenu un peu indéchiffrable» pour l’auteur dans les dernières années de sa vie, marquées par la maladie et les pertes de mémoire, a expliqué Rodrigo. Sur décision de ses proches, les manuscrits ont été conservés au Harry Ransom Center, une bibliothèque de l’université du Texas, aux Etats-Unis.

Un roman «dispersé»
Les avis des universitaires qui ont lu des fragments de l’œuvre ont finalement convaincu les deux frères de réunir ces épreuves dans un livre posthume, publié le jour anniversaire de la naissance de leur père, qui aurait eu 97 ans ce mercredi. «Lorsque nous avons lu les versions, nous nous sommes rendu compte que le livre était bien meilleur que ce que nous pensions. Nous avons commencé à soupçonner que Gabo avait perdu la capacité d’écrire, mais aussi la capacité de lire», et donc «la capacité de juger» ses propres écrits, a expliqué Gonzalo. Malgré les rumeurs selon lesquelles le roman n’avait pas de fin, les enfants et ayants droit de l’écrivain affirment que celui-ci avait entièrement développé l’histoire de Ana Magdalena Bach avant de mourir. «Le roman était un peu dispersé dans un nombre indéterminé d’originaux, mais il était complet.» C’était «un travail d’archéologie» que de rassembler les parties et d’arriver à une fin, a ajouté Gonzalo. Rodrigo l’assure, il n’y a pas d’autre roman caché du père du réalisme magique, de sorte que Nous nous verrons en août est le «dernier survivant» de son univers littéraire. La version espagnole est publiée dans plusieurs pays ce mercredi. La version française est sortie ce 13 mars chez Grasset et la version anglaise sera disponible le 20 mars.
Rfi