Le rapport annuel 2024 d’Amnesty International a été publié hier. Comme toujours, les violations de la liberté d’expression sont mises en exergue avec une judiciarisation de l’espace public, comme si rien n’avait changé. «L’ouverture d’information judiciaire ne doit plus être systématique. Il n’est pas nécessaire d’ouvrir une phase d’instruction. L’Etat du Sénégal a signé des chartes et conventions sur la liberté d’expression. Les sanctions concernant la diffusion de fausses nouvelles ou les diffamations sont disproportionnées», rappelle le Directeur exécutif d’Amnesty Sénégal, Seydi Gassama. Il interpelle les autorités sur certaines dérives. «Nous ne cautionnons pas les dérives, ni l’impunité, mais les peines de prison sont vraiment disproportionnées. Il faut aller vers des changements et ne pas prêter le flanc en faisant la même chose que l’ancien Président Macky Sall. Il faut dans ce cas une réforme de la législation», a déclaré le directeur d’Amnesty Sénégal.

Par ailleurs, il est aussi revenu sur la crise dans les médias provoquée par cette régularisation «au forceps» de l’Etat. «Lorsque le nouveau ministre de la Communication est arrivé, il a engagé un processus pour la régularisation des médias, leur mise en conformité avec le Code de la presse. Le Code de la presse est une loi de la République. Son adoption a fait l’objet de larges consultations. Notre cheval de bataille pendant ces consultations -nous avions même rencontré le groupe parlementaire majoritaire à l’Assemblée à l’époque- était de dépénaliser les délits de presse. D’autres avaient d’autres préoccupations. Nous avons finalement eu ce code que tout le monde a accepté et qui pose des obligations aux patrons de presse. Mais les médias ont un rôle important dans la démocratie sénégalaise, un rôle central même dans la transparence des élections au Sénégal. Il faut les accompagner dans cette phase d’assainissement, mais pas dans la précipitation. On ne peut pas réguler le secteur des médias en une année. Il faut que le ministre discute avec les acteurs pour trouver les solutions appropriées», alerte M. Gassama.

Il poursuit : «L’Etat peut, par ailleurs, décider de recourir à d’autres moyens pour la régularisation. Et l’aide à la presse peut être une alternative, car on peut bien la donner seulement aux médias qui sont dans la légalité.»