La récurrence des conflits fonciers découle de manquements liés à la gouvernance foncière, selon le Cadre de réflexion et d’action sur le foncier au Sénégal. La plateforme réclame une réforme à travers une approche inclusive.
Le Cadre de réflexion et d’action sur le foncier au Sénégal (Crafs) est pour la réforme de la gouvernance foncière au Sénégal. Depuis quelques mois, les litiges fonciers entre paysans et investisseurs sont légion au Sénégal. Les cas de Ndingler, Bande des filaos de Guédiawaye, Nguéniène, Tobène, Corniche Ouest ou le Phare des Mamelles rappelle la complexité de l’occupation des terres du domaine national. Pour le Crafs, ces conflits sont la conséquence des «manquements liés à la gouvernance foncière» aussi bien dans son corpus juridique et ses bases institutionnelles que dans ses outils et pratiques de gestion. «Les textes se révèlent peu adaptés au contexte changeant et restent difficiles à mettre en application. Des ambiguïtés de diverses natures subsistent encore et rendent précaire l’accès à la terre par les communautés. Pis, la situation continue de favoriser l’accès à la terre par une certaine élite politique, économique, religieuse, nationale et étrangère, au détriment de personnes et de communautés démunies, peu instruites et vulnérables», a constaté Thierno Sall, responsable de la communication et chargé de projets à l’Ong Enda Pronat hier, lors d’une table ronde entre le Crafs et la presse.
«Audit du foncier national»
Pour une gouvernance foncière plus démocratique, la plateforme née en 2010 réclame un audit du foncier national pour clarifier la situation de l’occupation foncière afin de déceler et corriger les irrégularités identifiées. «Cet audit est particulièrement urgent dans les zones appartenant au domaine public de l’Etat et dans celles à fort potentiel», a déclaré Babacar Diop, point focal en foncier du Cadre national de concertation et de coopération des ruraux (Cncr). Dans le même ordre d’idées, la plateforme d’organisations paysannes et de la société civile rejette l’immatriculation généralisée et la privatisation des terres du domaine national qui, estime-t-elle, favoriserait la marchandisation des terres. «Il faut la relance au plus vite du processus de réforme jusqu’à l’aboutissement de sa phase législative à travers une approche participative et inclusive. Les efforts humains et financiers mobilisés pendant 5 ans ne devraient pas être vains», a plaidé M. Diop.
Il est aussi demandé le renforcement du contrôle et de la participation citoyenne dans la gouvernance foncière au niveau le plus rapproché des populations et la mise en place de voies de recours plus efficaces et peu formalistes pour les populations qui se sentent lésées par une opération foncière. En effet, la Commission nationale de réforme foncière (Cnrf) est parvenue à produire un document de politique foncière. Le processus qui devait déboucher sur l’ouverture d’une concertation pour la validation dudit document et l’adoption d’un nouveau cadre juridique s’est arrêté en mai 2017, après la dissolution de la Cnrf. «Les actes posés par l’autorité laissent penser que l’Etat préfère une réforme techniciste qui passe par des outils cadastraux avec une volonté certaine de renforcer les pouvoirs de la direction générale des Impôts et domaines et de l’Apix», a déploré Babacar Diop du Cncr.