Le Collectif des amicales de l’Université Cheikh Anta Diop (Ucad) de Dakar brise le silence. Dans une lettre adressée au ministre de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, Abdourahmane Diouf, les étudiants lui rappellent les critères d’attribution des bourses et listent leurs doléances.Par Ousmane SOW –

 «Vous n’êtes pas le ministre des bourses !» Le ton est donné dès les premières lignes de la lettre ouverte adressée à Abdourahmane Diouf, ministre de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, par le Collectif des amicales de l’Université Cheikh Anta Diop (Ucad). Les étudiants haussent le ton et expriment leur ras-le-bol face à ce qu’ils considèrent comme une déconnexion totale entre la réalité du terrain et les déclarations de leur ministre de tutelle. «Et si vous l’étiez, vous semblez ne pas en avoir la maîtrise, car votre souhait est déjà une réalité. Pour que nul n’en ignore !» Dans la lettre, le collectif rappelle que les bourses ne sont pas attribuées de manière automatique. «Contrairement à ce que la communication de la tutelle laisse croire, tous les étudiants ne sont pas boursiers et ceux qui le sont répondent à des critères d’attribution pédagogiques ou sociaux fixés par le décret n°2014-963 du 12 août 2014 et l’arrêté 00532 du 15 janvier 2015», note le document. Dans la même dynamique, ils déroulent les règles d’attribution pour dénoncer l’hypocrisie autour du sujet. «Les bourses d’excellence sont ainsi attribuées aux étudiants ayant obtenu les mentions «Très bien» et «Bien» au baccalauréat ou aux lauréats du Concours général. Les bourses entières sont attribuées aux étudiants ayant obtenu la mention «Assez bien» au baccalauréat ou admis par concours dans les écoles et instituts. La demi-bourse est octroyée aux étudiants ayant obtenu une moyenne minimum de 10.90 au baccalauréat. Les bourses sociales sont données aux étudiants non bénéficiaires de bourses pédagogiques, orphelins, en situation de handicap ou malades, en priorisant le critère pédagogique en cas d’égalité de situation sociale», lit-on dans le document. Selon eux, sur la base de ces critères «objectifs» clairement définis, des milliers d’étudiants, «même ayant obtenu le Bac au premier tour, orientés parfois à des centaines de kilomètres de leur résidence habituelle, peuvent être totalement exclus du système de bourse. Ainsi, la seule réforme attendue est celle qui n’aura que pour finalité l’amélioration des conditions de vie et d’études, et non leur dégradation». Cependant, le collectif dénonce le paiement partiel des bourses depuis mars 2024. «Pour un étudiant à qui on doit 5 mois de bourse, l’Etat ne lui paie que 2 ou 3 mois, prévoyant de lui donner le reliquat au prochain mois», déplorent les étudiants, qui dénoncent également un abandon généralisé de l’Ucad. «Le 1er juin 2023, l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar a été abusée, sa vocation déviée, son âme corrompue, souillée et son avenir compromis. Après neuf mois de honte et de ridicule, dame Ucad rouvre ses portes en mars 2024, sous un vent d’espoir mais avec des stigmates vivaces», font-ils savoir, dénonçant aussi le manque d’amphis qui oblige certains étudiants à suivre les cours «debout ou assis sur une brique».

Par ailleurs, les masters s’éternisent : «Les étudiants en Master 2 de l’année 2022-2023 n’ont toujours pas soutenu leur mémoire.» Sans oublier qu’à l’Ucad, «il n’existe pas de complexe sportif, alors que le pays s’apprête à accueillir les Joj en 2026». Pour finir, le collectif lance également plusieurs réclamations au ministre. «Monsieur le ministre, les étudiants de l’Ucad vous demandent : la livraison des chantiers de logement, la construction de nouveaux amphis et salles de cours, l’équipement des laboratoires, le recrutement d’enseignants, l’accompagnement des étudiants en Master 2 victimes d’un système défaillant, la dotation en moyens de transport et la construction d’un complexe sportif à la dimension de l’Ucad. On ne demande pas le ciel», conclut le document.
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