La commémoration du génocide de la famille du Prophète de l’islam par la communauté des musulmans chiites mozdahir a vécu samedi. Un millier de personnes sont rentrées de Darou Hidjiratou (Sud du Sénégal) sensibilisées sur le caractère non festif de la Tamkharite, comme on nomme ce souvenir au Sénégal.Par Abdoulaye KAMARA – 

Des mots forts pour pointer du doigt les maux atroces que le petit-fils du Prophète, l’imam Hussein, a enduré les 10 derniers jours d’un mois lunaire de Muharram. A Darou Hidjiratou samedi passé, sous une tente étanche, refroidie par une forte pluie, Mme Traoré, venue de la France pour participer à la commémoration de la première édition d’Achoura dans le village natal du guide religieux Chérif Mohamed Aly Aïdara, a eu les mots justes et émus pour peindre ce jour de triste mémoire. Elle martèle, le trémolo dans une voix étreinte par la douleur : «Jour étrange. Jour de deuil. Jour sombre. Jour sanguin. Génocide !» Elle poursuit : «Chaque jour est Achoura, chaque jour est Karbala comme la terre de Darou Hidjiratou. Achoura, c’est la plus grande calamité que la terre n’a jamais portée. Achoura, loin d’être une défaite, est une victoire faite pour perdurer. Achoura, loin d’être une défaite, est un fardeau de réunification du message divin porté par Hussein.» Et puis de citer, presque en sanglots, les noms de toute cette lignée prophétique tuée par les armes de coreligionnaires. Parmi lesquels un bébé de 6 mois porté dans ses bras par l’imam lui-même. Ensuite, le guide Aly Aïdara en a rajouté une couche : «Lorsque l’imam Hussein a été encerclé par les ennemis de l’islam, prêts à l’exécuter, il leur a posé cette question : «Existe-t-il sur terre un seul descendant du Prophète autre que moi ?» Ils répondirent non. Je suis convaincu que si le Prophète vivait, il leur aurait demandé de le tuer à la place de Hussein ou alors c’est à lui, en personne, qu’ils allaient s’en prendre.»
Les mots étaient assez forts pour laisser indifférents le millier, certainement plus, de musulmans de toutes les écoles qui ont répondu à l’appel du président-fondateur de l’Ins­titut Mozdahir Interna­tional. Des pèlerins qui sont venus d’Europe, d’Amérique, d’Asie et de pays de la sous-région ouest-africaine tels que la Gambie, la Mauritanie, la Guinée Conakry, la Guinée-Bissau, le Mali, le Togo, la Côte d’Ivoire…
Des guides religieux du Fouladou, de l’école sunnite de l’islam, qui ont pris la parole, ont reconnu le caractère non festif de la Tamkharite. Puisant leurs argumentaires des versets du Saint Coran. Les vénérés marabouts Thierno Bassirou Diao, Thierno Amad Néné Kandé, Thierno Barro, on en oublie…, ont sensibilisé leurs talibés et ceux de Mozdahir pour se convaincre qu’Achoura est un jour de deuil ; tout en les appelant à s’instruire, à se former, à aimer le travail et à être plus solidaires.
Le guide religieux Aïdara ne cherchait pas mieux en délocalisant la célébration de cet événement religieux dans ce patelin bien reculé du Fouladou, à plus de 600 km de Dakar, la capitale sénégalaise. Chérif Mohamed Aly Aïdara note : «…Se rassembler paisiblement dans un village reculé tel que Darou Hidjiratou pour commémorer la tragédie qui toucha la famille du Prophète, c’est aussi faire connaître cette histoire et véhiculer les valeurs de paix, d’amour et de tolérance de l’islam originel à de nombreuses personnes de la région dont les cœurs sont tels des coupes attendant d’être remplies par la connaissance des Ahloul bayt.»
Au courant de la journée de samedi et des jours précédents, des centaines d’hôtes de Chérif Aïdara ont visité le mausolée de feu son père, Chérif Alhassane Aïdara, descendant de la famille prophétique.
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