Le Président sierra-léonais, qui remplace Bola Ahmed Tinubu à la présidence tournante de la Cedeao, devra tenter de relancer une structure dont le retrait des Etats de l’Aes bouleversera l’équilibre politique et économique de la région. Il faudra faire aboutir les ambitions de réforme de la Cedeao qui fête ses 50 ans.

50 ans, c’est pourtant l’âge de la sagesse. Pour la Cedeao, c’est le temps des interrogations après le départ de trois pays membres fondateurs de l’organisation dirigés par des putschistes : le Mali, le Niger et le Burkina Faso, désormais regroupés au sein de l’Alliance des Etats du Sahel (Aes). C’est au tour du Président sierra-léonais, Julius Maada Bio, de mener les réformes nécessaires après sa désignation à la tête de la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement, en remplacement de Bola Tinubu qui n’a pas réussi à garder les trois pays dans le giron de la Cedeao, en dépit des efforts diplomatiques. Cette fois-ci, la tradition d’alternance linguistique, entre pays francophones, anglophones et lusophone, n’a pas été trop respectée. Alors que le nom du Président Bassirou Diomaye Faye a été également cité. Lui qui a été désigné médiateur auprès des chefs d’Etat en rupture avec la Cedeao après son accession à la tête du Sénégal. «A Abuja, j’ai pris part à la 67e Session ordinaire de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest à un moment où notre région fait face à des défis majeurs. J’ai réaffirmé l’engagement du Sénégal pour une Cedeao unie, réformée et tournée vers ses peuples. (…) Ensemble, poursuivons l’œuvre des pères fondateurs de ce magnifique outil d’intégration qui vient de boucler 50 années d’existence», a déclaré le Président Bassirou Diomaye Faye qui a pris part à cette rencontre.
Le Président sierra-léonais devra relancer une organisation régionale affaiblie, mais toujours centrale pour l’avenir de l’Afrique de l’Ouest. Lors de la Conférence régionale organisée à Dakar du 18 au 20 juin 2025, à l’occasion du cinquantenaire de la Cedeao, Afrikajom Center, Africtivistes, le Réseau Wademos, Tournons la page et Trust Africa, avec le concours d’universitaires, de personnalités politiques, de représentants des Etats membres et des sociétés civiles de la Cedeao et de quelques membres de l’Alliance des Etats du Sahel (Aes), d’organisations de jeunes, de femmes et de représentants du secteur privé espèrent une structure réformée et au service des peuples ouest-africains. «Nous appelons les chefs d’Etat et de gouvernement des Etats membres de la Cedeao à : initier rapidement une réforme profonde et ambitieuse des institutions de la Cedeao comme réponse aux attentes légitimes des citoyens de la communauté, relever les défis politiques, économiques, sociaux sécuritaires et géopolitiques de la région et du continent africain. Afin d’adapter ses normes et pratiques politiques aux aspirations profondes des peuples d’Afrique de l’Ouest.» Ces organisations veulent «accélérer le passage effectif d’une Cedeao des Etats à une Cedeao des peuples afin de permettre une participation citoyenne à la transformation qualitative de la citoyenneté régionale» et «ouvrir des espaces propices aux interactions permanentes avec les sociétés civiles, à la participation effective des jeunes, des femmes et du secteur privé dans le processus de prise de décision et d’élaboration des politiques publiques régionales, à travers des mécanismes communautaires transparents de dialogue et de reddition des comptes».
En tout cas, Afrikajom Center et autres demandent à «réévaluer les politiques sécuritaires existantes en vue de les adapter au contexte global, en tenant compte de la nature et du niveau des menaces que connaît la région», et «accélérer l’entrée de la région dans la révolution numérique à travers l’élaboration de mesures en faveur de l’intégration économique et monétaire pour une convergence macroéconomique effective au soutien du développement, du secteur privé, des Petites et moyennes entreprises (Pme), du secteur informel, de l’innovation, et à la création d’une monnaie unique régionale et l’accroissement de l’expertise en matière numérique, à investir dans les infrastructures, à accompagner et soutenir la recherche, à créer des cadres favorables à l’économie numérique et à l’intégration des entreprises, et la réalisation d’une gouvernance numérique inclusive, transparente et multipartite qui favorise le développement du secteur et la protection des libertés fondamentales».
«Nous engageons les institutions de la Cedeao, les Etats membres, les Forces vives de la société, les organisations citoyennes, les partenaires régionaux et internationaux à se joindre à cet appel pour soutenir et bâtir ensemble une véritable Cedeao des peuples, rénovée, souveraine, démocratique et tournée vers le progrès et le bien-être des populations», appellent les organisations de la Société civile.