Le titre phare de la presse privée algérienne, El Watan, traverse une crise économique sans précédent, au point que la célèbre publication est sur le point de fermer boutique. Très lourdement endettée depuis la période de la pandémie du Covid-19, l’entreprise de presse n’arrive pas à se remettre de cette situation. Ce qui n’a pas manqué de pousser ses salariés, pour rentrer dans leurs fonds, à observer des mouvements de grève à répétition dont le dernier, qui va durer quatre jours, pourrait devenir illimité.

Par Mamadou T. DIATTA – En Algérie, les temps sont durs pour la presse libre et indépendante. Le très célèbre organe de presse privé, El Watan, est en effet en train de vivre ses derniers jours de parution quotidienne, du fait d’une crise sans précédent que traverse la publication privée algérienne. Le journal «s’achemine vers la fermeture définitive». Ce constat a été fait par le directeur de publication d’El Watan, Mohamed Tahar Messaoudi, écrit Le Monde. Ce dernier a confirmé, en effet, à sa manière, la fin de «l’aventure intellectuelle». Une expression qui avait été utilisée en 1990 pour désigner le démarrage, avec l’aide de l’Etat, d’une presse privée. Une année où le Front islamique du salut (Fis) avait remporté le scrutin législatif avant que celui-ci ne soit interrompu par le régime alors en place à Alger.
Le journal francophone algérien, florissant il y a encore quelques années, est dans l’incapacité de payer ses salariés depuis le mois de mars dernier. Las de se battre pour que cette situation connaisse un changement positif, les travailleurs de l’entreprise de presse ont lancé le 12 juillet dernier, un mouvement de grève à répétition. Ils ont opté pour la même attitude encore le dimanche 24 juillet en démarrant un nouveau mouvement d’humeur. Cette nouvelle grève, qui va durer quatre jours, pourrait être illimitée.
La situation qui prévaut au niveau du quotidien privé algérien, El Watan, survient «trois mois après la décision du milliardaire Issad Rebrab de saborder le journal Liberté sans possibilité de reprise». Conséquence : un autre titre phare de l’«aventure intellectuelle» risque de disparaître, fait-on comprendre du côté d’Alger.
El Watan  est un fleuron de la presse privée algérienne. Il a été lancé en 1990 par des journalistes qui étaient issus du secteur public. Une longue période faste a permis à la très célèbre publication «d’investir, en association avec le journal arabophone El Khabar, dans une imprimerie». «Mais depuis quelques mois, sa situation est devenue intenable. Ses comptes sont bloqués, l’administration fiscale lui réclamant 55 millions de dinars (près de 370 000 euros) de charges impayées tandis que le Crédit populaire d’Algérie exige le paiement d’une partie d’un crédit de 45 millions de dinars», informe encore Le Monde.
D’après la direction du journal, ces dettes ont été largement contractées durant la période de la pandémie du coronavirus. Une situation qui «a lourdement impacté la santé financière de l’entreprise». La crise que traverse le journal divise aussi le lectorat, «qui s’est considérablement effrité au fil des ans». Une partie des lecteurs est d’avis qu’El Watan demeure un «journal de référence» à défendre «à tout prix», tandis que d’autres estiment devoir venir en soutien aux salariés. Ces derniers, qui sont en conflit avec les 18 actionnaires, reprochent à ces derniers une «mauvaise gestion» et l’absence de «geste envers les employés». Ce qui ne manque pas de susciter des commentaires. Puisqu’en privé, des salariés soutiennent que «les actionnaires ont suffisamment engrangé de dividendes, durant la longue période où le journal a été abondamment servi en publicité, pour être en mesure de débloquer la situation».
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