Depuis le recensement du premier malade de Covid-19 dans le Baol en mars dernier, la région de Diourbel a enregistré environ 1 280 cas positifs et 98 décès. Le constat a été fait hier par le médecin-chef de la région médicale, Dr Mamadou Dieng, qui déplore le non-respect des mesures barrières, malgré l’augmentation des décès.
Le décompte donne des vertiges : A l’instar des régions de Dakar et Thiès, Diourbel est fortement touchée par la deuxième vague du coronavirus. Cette situation est jugée inquiétante par le médecin-chef de région qui dissèque la situation épidémiologique au niveau de la région. Dans un entretien avec Le Quotidien, Dr Mamadou Dieng a fait savoir que la région a enregistré presque 1 280 cas positifs au coronavirus et 98 décès depuis l’apparition du virus dans le Baol. «Nous sommes à 98 décès au niveau régional. Avec la deuxième vague, nous avons connu une hausse notoire, car le nombre de décès a augmenté de manière significative. Cela est dû au fait qu’il y a beaucoup de cas graves qui font un recours tardif aux services de santé parce que souvent ce sont des cas dont les familles n’acceptent pas qu’ils aillent à l’hôpital de peur qu’on leur dise que c’est le Covid-19. Mais parfois quand ils arrivent, non seulement ils seront positifs, mais ce sont des cas graves. La plupart des décès ne font pas plus de 72h dans nos structures de santé. Ce sont des cas excessivement graves qui nous arrivent», a-t-il dit. Que faire pour inverser la tendance ? «Il faut aujourd’hui, souligne-t-il, renforcer la détection des cas graves, mais aussi faciliter le recours précoce et sensibiliser également les communautés sur le respect des mesures barrières parce qu’à Touba, la pandémie est en train de se propager en touchant de plein fouet les sujets âgés qui ont des comorbidités, et cela augmente le nombre de décès.» Par rapport au taux de létalité, Dr Dieng estime qu’il est élevé par rapport au nombre de malades hospitalisés. «Si vous faites le calcul, c’est très élevé parce qu’il y a beaucoup de décès ces derniers temps», a-t-il ajouté.
Selon Dr Dieng, l’augmentation de ces cas est due à plusieurs facteurs dont le principal est d’ordre comportemental. «Il n’y a pas eu de changements notoires de comportement allant dans le sens de prévenir la transmission, surtout au niveau de la communauté, malgré toute la communication faite sur les mesures barrières. Les gens ne respectent pas les mesures et certains sont toujours dans le déni. Maintenant en plus des autres facteurs, il y a le brassage, les rassemblements que les gens continuent à tenir dans certains quartiers et les marchés», dit le médecin-chef de Diourbel. Il ajoute : «Par rapport au transport aussi, rien n’a changé, car le port du masque n’est pas respecté dans le transport public et surtout à Touba. Les comportements sont aux antipodes des mesures que nous prônons et avec la levée de beaucoup de mesures, la pandémie est revenue en force.»
«Il faut s’attendre à voir la variante anglaise dans nos pays»
Aujourd’hui, Dr Dieng plaide pour l’amélioration des plateaux techniques au niveau des services de santé en renforçant les équipements, notamment les respirateurs, les débitmètres, les oxymètres et le personnel. Mais aussi, poursuit-il, il faut augmenter la capacité litière pour faire face à une affluence de cas graves. «Pour le moment, l’option est de mettre deux centres au niveau de Touba, notamment à Toscana et au Cte de Matlaboul Fawzaïni, et un autre centre de traitement au niveau de l’hôpital Heinrich Lübke de Diourbel. Les centres de traitement, là où il y a quelques cas, ce n’est même pas la peine de les réactiver. L’option aujourd’hui est de traiter les malades à domicile pour les cas simples. Sinon, on va ouvrir des centres de traitement qui n’auront pas de patients. Tous les centres sont fonctionnels», poursuit-il.
Face à cet afflux de cas, le confinement resterait la dernière mesure. Lui insiste sur le changement de comportement. Dans un contexte où les gens ne portent pas de masque, se rassemblent, sans oublier la promiscuité dans les marchés et les transports publics, la situation semble très compromise. «Au lieu d’aller vers le confinement, il faut d’abord régler ces questions. Il faut obliger les gens à porter les masques, interdire les rassemblements, réglementer les marchés, le transport public. Ce sont des mesures concrètes sur lesquelles on peut avoir des résultats», enchaîne-t-il en mettant en gras les risques liés au confinement total : «Vous confinez les gens, ils vont se rassembler à l’intérieur des maisons et ils vont se transmettre mutuellement l’infection. Je pense qu’il y a lieu d’essayer de faire respecter les mesures, de veiller à ce que les gens ne fassent plus de surcharge et que l’on interdise les cérémonies. Je pense que cela a plus de retombés que le confinement.»
Soucieux de la situation actuelle, Dr Mamadou Dieng implore les populations, notamment de Touba, à suivre l’exemple du khalife général des Mourides qui porte régulièrement son masque. Surtout que le virus circule dans tout pays. «Le virus est transporté par les êtres humains. Il faut s’attendre à voir la variante anglaise dans nos pays. Nous ne sommes pas à l’abri de cette souche tant qu’il y a des circulations. Le monde est globalisé, donc il faut se doter des moyens de détecter certaines souches», préconise-t-il.