A la Galerie Ourouss, l’exposition All the lives imagined des artistes Moses Hamborg et Tabia Onabolu est un moment privilégié pour connaître Dakar et ses images. Moses fait le portrait du quotidien des habitants de la capitale.

Par Bocar SAKHO – A la Galerie Ourouss des Almadies, se déroule l’exposition All the lives imagined de Moses Hamborg et Tabia Onabolu, qui va prendre fin le 9 juin prochain. Dans ses œuvres, Moses «portraitise» la vie quotidienne dakaroise où les images se juxtaposent dans un décorum époustouflant. «Quand Moses peint, il fait un live, donc il n’utilise pas de photo. Il s’assoit avec chaque sujet pendant des heures et des heures. Lui, il dit que c’est presque une question de circonstance. Ce sont des gens qu’il rencontre à Dakar et il veut passer un peu plus de temps avec eux, donc c’est vraiment une question de rapport, mais aussi il tire son inspiration de la vie quotidienne à Dakar. C’est là que vous voyez les étiquettes sur les taxis… et chaque tableau a des références, comme le phare des Mamelles ou autre. En fait, il dit surtout que malgré le fait d’être artiste, ce qui l’intéresse, ce n’est pas un rapport visuel avec le sujet. C’est plutôt pouvoir passer du temps ensemble», explique Laetitia Walendom, curatrice, écrivaine, urbaniste et productrice tricontinentale, actuellement basée entre Dakar et Baltimore.

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Pour M. Moses, la vie dans la capitale est une succession d’images et de rencontres. «Depuis son arrivée à Dakar, il s’inspire de la vie quotidienne. Par exemple, il y a beaucoup de gens qui portent les Djellabas, surtout le vendredi pour aller à la mosquée. Aussi, Moses était maître-nageur pendant 10 ans, donc il aime beaucoup la plage. Il aime surtout aller, par exemple, vers la Mosquée de la Divinité», ajoute-t-elle. Sur place, il observe les gens qui vont, qui viennent de la mosquée avec «leurs tenues très élégantes, très belles, et les tapis de prières en main». «Mais Papa Laye, par exemple, surtout, il a juste débarqué au début du Ramadan comme ça. C’est un jeune Baye Fall, il a le sabar en main. Et pour lui, la composition était facile. C’était très, très simple pour Moses de faire son portrait, parce que ça vient directement de la personnalité, du caractère de la personne», dit-il.

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De nationalité américaine, basé à Los Angeles, Moses est devenu un «Dakarois» qui promène son regard pour capturer une ville en perpétuelle mutation. «Vous allez voir que généralement tout le monde a un regard très dynamique. C’est comme si vous vous posez devant les tableaux et vous connaissez déjà la personne. Donc, pour Moses, il aime surtout peindre quand la lumière est parfaite, parce que ça permet de voir directement l’expression de la personne, la manière dont il se pose, et tout ça d’un moment à un autre. Et le regard visé, je peux même dire que c’est… une manière surtout d’immortaliser la personne. On sait très bien que tous ces portraits-là, ce ne sont pas seulement des gens qui viennent de contextes aisés. Ça leur permet de s’immortaliser parce que Moses, il a été formé dans la tradition des Old Masters (vieux maîtres), donc ceux de la Renaissance, les grands Européens et tout ça. Et on sait qu’à l’époque, ce sont surtout pour les reines, les rois et tout ça, mais le contraste ici, c’est qu’il permet de présenter ce regard très régalien de tout le monde dans la communauté, de tout le monde à Cité Mbackiou Faye à Ouakam», enchaîne la curatrice.  Pour lui, c’est une résidence Black Rock. En contact avec la ville, il se confond dans son quotidien.

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«Et c’est au fur et à mesure, quand il a rencontré plusieurs personnes, que lui-même, il s’est permis d’apprendre le wolof. Parce que, comme vous le savez, il ne parle pas du tout français, mais il a pu rencontrer beaucoup de monde. Et depuis deux ans maintenant, quand il revient à Dakar, la dernière fois, il était là pendant neuf mois, il habitait avec une famille Baye Fall. Donc tout ce monde que vous voyez là, c’est une grande famille. Vous allez les revoir aussi pendant la prestation de tout à l’heure. Mais c’est que surtout chaque personne est aussi artiste à sa propre manière. Par exemple, Penda est styliste, Papa Laye joue du mbalax. Zeyna qu’on voit là, elle est griotte, donc elle a une voix tellement époustouflante.

Et même Maman, qui est juste derrière, elle est aussi créatrice, donc c’est elle qui a fait ma robe aussi. Donc avec chaque personne, il y a un rapport très personnel qui permet non seulement de rester assis ensemble pendant plusieurs jours, mais de devenir de bons amis», dissèque Mme Leaticia Walendom.

Moses Hamborg est né en 1995 à Huntington Beach, en Californie (Etats-Unis), mais il vit et travaille actuellement entre Los Angeles et Dakar, et est diplômé de l’Académie d’art de Florence.
bsakho@lequotidien.sn