#Mbour – Innovation sociale et numérique pour transformer la vie des femmes : Le Centre genre de la Cedeao mise sur la science

Lors de la rencontre annuelle des points focaux du Centre de développement du genre de la Cedeao, tenue à Saly ce week-end, la Commissaire au développement humain et aux affaires sociales, Pr Fatou Sow Sarr, a dressé un état des lieux ambitieux et porteur d’avenir pour la promotion du genre dans la sous-région. Elle a également décliné les programmes phares, les outils de suivi et les défis continentaux. «Cette rencontre est extrêmement importante pour nous. Elle permet de faire un bilan d’étape sur toutes les réalisations du Centre genre parmi lesquelles les usines de serviettes hygiéniques, l’observatoire du genre dans la sous-région, le programme 50 millions de femmes ont la parole, qui est une plateforme digitale qui permet à des femmes d’avoir accès aux informations, aux marchés, à des échanges. Mais nous avons aussi l’agenda baromètre qui nous a permis de faire la situation de référence de tous les pays membres et ensuite d’élaborer un indice de l’égalité au même titre que l’indice Mo Ibrahim qui nous permet régulièrement de classer nos pays sur une échelle de 1 à 10», a souligné Pr Sow. Pour faire le point sur les initiatives en cours dans les pays membres de la Cedeao, il faudra procéder à leur évaluation et définir les axes prioritaires pour les années à venir. Les points focaux, venus des 15 Etats membres, ont partagé leurs expériences et résultats afin de favoriser une mutualisation des bonnes pratiques. «Il s’agit pour nous de dresser le bilan des programmes déjà mis en place, d’en évaluer les impacts et de proposer de nouvelles actions plus efficaces et mieux adaptées aux réalités des pays membres», a expliqué la commissaire.
Parmi les programmes mis en avant, plusieurs retiennent l’attention pour leur impact direct sur les populations. Selon les résultats de cette année, la Côte d’Ivoire arrive en tête du classement en matière d’égalité de genre, suivie du Sénégal et du Ghana. L’indice permet de mesurer les progrès, mais surtout d’identifier les domaines où chaque pays peut mieux faire. «Ce n’est pas seulement une question de classement. L’outil nous permet de réaliser non seulement cette évaluation, mais de revenir chaque année ou tous les deux ans, d’essayer de reprendre un peu, d’ajuster en fonction des données, de faire une mise à jour qui nous permettra de voir comment chaque pays a avancé, voir les points faibles et accompagner les pays dans leurs efforts», a précisé la Commissaire au développement humain et aux affaires sociales. Un autre programme, qui a eu un impact sur les populations, la plateforme numérique «50 millions de femmes ont la parole», qui permet aux entrepreneures d’avoir un accès à l’information, aux marchés et à des opportunités d’échanges. «Cette plateforme est une réponse digitale aux besoins économiques des femmes. Elle les connecte aux ressources, leur ouvre des marchés et renforce leur pouvoir économique», souligne la commissaire.
Pour la lutte pour la dignité, le Centre genre a également a initié des usines de serviettes hygiéniques. Pr Fatou Sow Sarr souligne que cela constitue un des projets les plus innovants, car il concerne la mise en place d’usines de production de serviettes hygiéniques, notamment au Sénégal. Ces usines visent à briser un tabou et à améliorer l’hygiène menstruelle des jeunes filles, facilitant ainsi leur maintien à l’école. «Nous avons constaté que beaucoup d’écolières manquent l’école pendant leurs règles, ce qui nuit à leur scolarité. Ces usines permettront de changer cela», explique-t-elle.
En plus des impacts directs, ces programmes ont aussi des conséquences indirectes car ils promeuvent l’économie circulaire, la création d’emplois pour les femmes et la protection de l’environnement grâce à des produits biodégradables.
Elle a également souligné le travail que le Centre genre de la Cedeao abat concernant la paix et la sécurité. «Dans un contexte régional marqué par des tensions politiques, des conflits armés et des crises post-électorales, l’inclusion des femmes dans les processus de paix est devenue une priorité. Nous travaillons dans différents pays en post-conflit pour identifier comment intégrer le visage féminin de la paix dans les processus de stabilisation», a affirmé la commissaire. Elle a cité l’exemple inspirant de Sato Kamara, présidente de l’Assemblée nationale de Guinée-Bissau, dont l’action a été décisive dans la résolution de la guerre civile dans son pays. Elle ajoute que le Centre genre a déjà mené des activités similaires en Casamance avec les femmes de Niassya, et continue son travail dans d’autres zones en crise.
Malgré les avancées notables, des défis majeurs restent à relever comme l’accès aux technologies, la fracture numérique, les violences basées sur le genre et la faible représentativité des femmes dans les sphères de décision qui continuent d’entraver les progrès. «Nous avons encore beaucoup à faire pour garantir une véritable égalité. Mais les bases sont solides et les résultats obtenus jusqu’ici nous encouragent à aller plus loin. Parmi les nouveaux enjeux, il y a la digitalisation des programmes, l’intégration de l’Intelligence artificielle pour un meilleur suivi et l’élargissement du programme de santé sexuelle et reproductive dans les zones rurales», précise la sociologue.
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