Le traitement médiatique des questions liées à l’homosexualité, sous l’angle religieux et judiciaire, est globalement négatif. Mouminy Camara, auteur d’«Image et voix des minorités sexuelles dans les médias au Sénégal», estime que la presse alimente un discours anti-homosexuel. Il en appelle au respect des règles journalistiques.

L’information relative à l’homosexualité apparaît dans les médias sous l’angle de la religion et de la justice. C’est un constat fait par Mouminy Camara, auteur de l’étude sur Images et voix des minorités sexuelles dans les médias au Sénégal. Une étude commanditée par l’Institut Panos Afrique de l’Ouest dans le cadre de son projet des «Voix et des voies contre l’homophobie». Mouminy Camara fait allusion aux comptes rendus de procès incriminant des pratiques et des actes contre nature, mais aussi des commentaires des religieux sur cette problématique.
Pour l’auteur de cette étude, la présence de ces deux thèmes transversaux (religion et justice) dans la presse sénégalaise n’est pas fortuite. «Elle reflète l’importance de la religion au Sénégal avec plus de 90% de la population composée de musulmans». De ce fait, indique M. Camara, la presse accorde un large espace à des commentaires religieux conservateurs selon lesquels l’homosexualité serait un «mal», une «dépravation», une «maladie», un «fléau». Ainsi, relève-t-il, la presse émet des jugements, des opinions sur les homosexuels, sans pourtant leur donner la parole dans les articles qu’elle produit.
Quant au thème judiciaire, poursuit le consultant, «il est concomitant à celui de la religion puisqu’en dehors de la législation, notamment l’article 219 du Code pénal qui punit les actes contre-nature, le poids de la religion intervient dans la répression de cette minorité sexuelle (arrestation, emprisonnement)».
Pour le consultant, il apparaît essentiellement dans le discours médiatique «une manipulation du sentiment anti-homosexuel par des représentants politiques et religieux conduisant à des actes de violence». Cette violence, selon lui, est «aggravée par certains médias qui ont servi de tribunes ou de plateformes d’expression aux menaces physiques, aux agressions, insultes, sans en contrepartie permettre un discours opposé, susceptible de défendre les minorités sexuelles». Ce qui fait dire à l’expert que «les médias, en grande partie, ont un rôle négatif en ce qui concerne la question de l’homosexualité».
Les discours anti-homosexuels, tels qu’ils sont diffusés dans les médias, sont si «prégnants qu’il est souvent difficile de percevoir des voix dissidentes». A part quelques Ong de défense de droits humains qui souvent prennent la défense de ce groupe minoritaire.
Pour remédier à ce parti-pris de dévalorisation et de stigmatisation des homosexuels dans la presse sénégalaise en général, l’auteur de cette étude en appelle à la responsabilité des médias et des écoles de journalisme. Il faut, selon lui, corriger la tonalité globalement négative du traitement médiatique du sujet des minorités sexuelles tout en respectant les règles journalistiques de la pluralité des sources, de l’impartialité et de l’équilibre de l’information.
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