Dans le but de renforcer la gouvernance sanitaire, Enda santé veut mettre à profit les parlementaires ouest-africains, notamment dans la digitalisation du système.Par Justin GOMIS – 

La bonne gouvernance des données sanitaires est une préoccupation majeure d’Enda santé. Pour cette raison, l’Ong a organisé, ce mercredi, un atelier sous-régional avec les parlementaires de la Cedeao, en vue «de mieux profiter de l’opportunité qu’offre la digitalisation dans le renforcement du système de santé et l’amélioration des services».
L’objectif visé dans cette rencontre est de «protéger les données personnelles pour garantir la confidentialité, la sécurité et éviter toute mauvaise utilisation des données des patients», parce «qu’il est nécessaire d’établir cette relation de confiance avec le patient pour qu’il se sente respecté, à l’aise dans le partage et l’utilisation sécurisée des données pour son bien-être, celui des populations, ainsi qu’une facilité d’accès à ses propres données».
Mais pour ce faire, il faudrait «revoir et renforcer le cadre réglementaire régissant la collecte, la gestion et l’utilisation des données sanitaires dans les structures de soins» acquis dans le cadre d’une politique de gouvernance au niveau de la Cedeao et de l’Oas (Orga­nisation africaine pour la santé) pour pouvoir collecter les données des pays.
C’est ainsi qu’ils ont organisé cette rencontre avec les parlementaires de la Cedeao, afin qu’ils puissent porter le plaidoyer au niveau de leurs gouvernements respectifs. «La gouvernance des données sanitaires devrait être une priorité pour nos Etats afin de rendre réelle et opérationnelle la digitalisation des systèmes de santé», soulignent-ils dans les termes de référence. De l’avis des organisateurs, «on obtiendrait un engagement politique de haut niveau et un consensus sur les grandes lignes d’une politique de gestion et d’utilisation des données sanitaires au niveau des pays». Cela «permettra à chaque pays de mettre en place un cadre juridique et réglementaire adapté qui régit la collecte, la propriété et l’utilisation des données sanitaires», disent-ils.
Selon Nguissali Turpin, Directrice exécutive d’Enda santé, il est important pour eux «de savoir où se trouve l’ensemble de ces données lorsqu’elles sont collectées, comment elles sont stockées et comment elles sont sécurisées». Et c’est toute la pertinence de la mise en place d’un cadre réglementaire qui permet de s’assurer que toutes les considérations sont bien prises en charge.
En fait, cette consultation régionale offre ainsi aux membres de l’Ong Enda santé de pouvoir s’entretenir directement avec les parlementaires de la Cedeao, afin de les sensibiliser sur cette question et de voir dans quelle mesure ils pourront travailler de concert en vue de mettre ensemble les principes directeurs nécessaires qui leur permettent d’aboutir à ce cadre réglementaire au niveau du Sé­négal et de l’espace de la Cedeao, indique madame Tur­pin.
Pour cette première, Enda santé a pu réunir 7 parlementaires de la Cedeao qui représentent la Commission de la santé et celle de l’Education. Ces députés, qui ont répondu à cette invitation, cherchent à mieux comprendre les concepts de la digitalisation des données de la santé et la gouvernance des données sanitaires. «Il fallait-être là pour se rendre compte de l’utilité de l’atelier», dit René Assine, député parlementaire du Sénégal au Parlement de la Cedeao.
Le président de la Com­mission éducation, culture, jeunesse et sport s’empresse ainsi de rassurer Enda santé sur leurs engagements pour cette affaire qui intéresse et interpelle tout le monde. «Faire des analyses à l’hôpital et obtenir des résultats qu’on vous donne, mais le reste, vous ne savez pas où est-ce que ça part. Il faut qu’on aille dans le sens d’une garantie que ce que nous avons laissé là-bas sera tenu secret, sera bien soigné et que ça puisse aussi servir pour la prochaine fois. C’est ce qui est important», précise le député, selon qui «la protection des données au niveau sanitaire est une question de souveraineté sanitaire parce que la santé est avant tout privée».
En tout cas, depuis 2020, les organisateurs ne cessent de s’employer à faire la promotion de ce cadre réglementaire au niveau des pays membres de la Cedeao. Ce qu’ils recherchent aujourd’hui, c’est d’encourager chaque pays sur la voie d’une politique interne de gouvernance des données sanitaires. A en croire Ibrahima Khaliloulah Dia, coordonnateur de la Cellule de la santé numérique au ministère de la Santé, le Sénégal n’est pas profane dans ce domaine. «Le ministère de la Santé et de l’action sociale a commencé à travailler sur cette question de santé numérique depuis 2017. On a eu la chance d’avoir l’engagement du président de la République qui a à plusieurs reprises rappelé l’urgence d’aller vers ça et qui a même mis des ressources à la disposition du ministère de la Santé pour 5 ans avec la Banque mondiale. Pour booster et lancer la santé au Sénégal, nous avons commencé le travail. Nous sommes en train de voir comment mettre en place un dossier de patient, qui doit voyager avec le patient. Nous sommes en train de voir comment équiper nos centres de santé en télémédecine pour que le patient ne se déplace que quand c’est obligatoire. Nous sommes en train de réfléchir sur ce que nous avons comme logiciels, comment les rendre interopérables», rassure-t-il en montrant l’intérêt que le Sénégal trouve à cette conférence régionale.
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